
Dans le cas de Séraphine, c'est tant mieux, parce que c'est un film remarquable. D'abord, l'histoire vraie jusqu'ici trop condifentielle de cette miséreuse devenant peintre reconnue méritait d'être sublimée à l'écran. Martin Provost s'en charge avec une grande sobriété, teintée de pudeur bienveillante et d'humour. Séraphine est un personnage fragile, une femme de ménage énigmatique, qui fait des calins aux arbres et parle aux oiseaux. Elle reçoit un jour l'ordre célèste de peindre, et s'exécute, frénétiquement, avec les moyens du bord. Les anges guident son pinceau, dit-elle. Un critique d'art allemand repère son travail avant-gardiste, et lui fait promettre de perséverer, avant d'être happé par la Première guerre mondiale.
Séraphine est clairement dérangée, mais le malaise ne s'installe jamais, on est absorbé par l'interprétation rayonnante et poétique de Yolande Moreau. Ses mimiques sont impayables, comme lorsqu'elle prélève un peu de cire sous les yeux d'une statue la Vierge pour faire ses mélanges. Gloussement dans la salle. Le schéma narratif est classique, mais l'histoire est trop belle pour qu'on se lasse.

Que va t-il arriver à la maison et ses objets après la mort d'Hélène ? C'est tout l'enjeu du film, ce qui peut sembler barbant, a priori. Les inventaires et conversations à propos de telle tasse ou tel dessin peuvent paraître lassants, mais se révèlent décisifs par la suite. Chacun défend ses intérêts. C'est finalement Héloïse, la gouvernante, qui offre le moment le plus savoureux du film. Elle demande à garder ce qu'elle pense être un modeste vase, en souvenir d'Hélène. Elle le trouve beau quand on met des fleurs dedans, c'est un peu une Séraphine elle aussi. Je ne dois pas tout dévoiler, mais cette scène est un bijou.
Deux films à voir, pleins de finesse et de nuance, qui forment un écho intéressant et qui confirment, surtout vu d'ici, que le cinéma français est un monde à part.
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